Je commence le graffiti à Montpellier en 2001. Au début de chaque histoire et de chaque passion, il y a la lune de miel. La destination – que je n’avais absolument pas choisie – était superbe, ceux qui ont connu le graffiti à Montpellier à cette époque s’en souviennent. Le rapport quantité/qualité et personnalités passionnées parfois dérangées des acteurs était à son apogée…
Avant je posais Cosa, avec Acko, Pablo et Mek (FR Crew). J’ai été largement influencé par la scène locale, mais aussi le début des vidéos sur internet : Area 08, Dirty handz 2, Monsters Of Art ou encore Attentat à la Bombe pour ne citer que celles qui m’ont le plus marqué. Depuis ce temps là je peins toujours avec passion, là où la vie m’amène, au gré des voyages et au fil des rencontres. Le graffiti reste quoi qu’il arrive le fil conducteur de tout ce qui m’anime. Voici une sélection anecdotique façon 12shot de mes dernières peintures murales les moins poussiéreuses…
#1 Fusion
Twone est clairement le mec avec qui j’ai le plus peint ces dernières années, il est vraiment bouillant et nous avons des affinités artistiques proches. Ici, une seule et même pièce, neuf lettres fusionnées… à déchiffrer.
#2 La ville Rose et bleue
Deux jours, trois pièces à Toulouse. Celle ci date de septembre 2019, réalisée en compagnie de Mesh, Iker, Panks, Twone et Toncé. En balade avec Twone, une fois n’est pas coutume, nous sommes accueillis en grandes pompes par Panks et Reso. Le lieu où ils bossent et organisent l’Open Summer Festival est juste dingue, leur hospitalité et leur gentillesse c’est du quatre étoiles. Nous étions déjà descendus ensemble quelques fois sur Toulouse histoire de changer d’air, peindre d’autres murs, rencontrer ou retrouver d’autres graffeurs. Toulouse est une destination de choix et elle tient toujours ses promesses. Ayant vécu six ans à Bordeaux, c’est rapidement devenu une étape incontournable lors des aller-retour à Montpellier.
#3 La belle endormie
Bordeaux a marqué une partie de ma vie. En 6 années de vie là-bas j’ai rencontré des potes et une famille pas comme les autres : les 3GC. Je pense qu’on a eu pendant un moment la réputation de mecs qui voyaient les choses en grand, qui pensaient collectivement. Ça transpirait le graff, nous étions tous sur Bordeaux-centre, si on peignait pas on se pintait au Vintage Bar, ou bien on prétextait «une réunion» qui ressemblait clairement plus à un comptoir de PMU qu’à une assemblée générale. Rues, panels, terrains : bien qu’ayant un peu levé le pied, le crew est toujours actif. Drop, Cone et Stab nous on rejoint récemment, et d’autres projets collectifs verront le jour c’est certain.
Cette photo a été prise lors de notre dernière fresque collective, aux bassins à flots en 2019. Pas facile de choisir une photo pour illustrer tant de choses, mais après tout un cosmonaute qui fait du skate avec une bière et une bombe à la main… pourquoi pas !
#4 Le Verdanson
Retour à Montpellier, au Canal du Verdanson. Avec du recul, je me dis que ce spot est un peu comme le graffiti, certains l’aiment, d’autres le détestent. Chacun a ses raisons d’ailleurs, mais indéniablement, malgré ce que peuvent en dire les gens, ce spot fait partie de l’histoire du Graffiti à Montpellier. Tout le monde y est passé, depuis les premiers tags de Montpellier jusqu’à aujourd’hui.
En 2003, j’étais au bahut à coté et je manquais jamais une occasion d’aller y mettre quelques petits chromes ou couleurs de temps en temps. A cette époque les murs comme on les voit sur cette photo n’existaient pas, les travaux du canal tel qu’on le connait ont été terminés il y a une douzaine d’années.
Ici, une petite bande peinte en Octobre 2017 avec Twone, Stab, Colf et Uneak. Cette pièce est restée presque une année entière, rare pour le Verdanson. Mais ce n’est pas tout, vous pouvez aussi la trouver dans le calendrier des pompiers de Montpellier, Août 2020, avec la photo de classe devant !
#5 Salut Cousin !
De 2013 à 2017, j’organise chaque année au printemps La cousinade dans le canal du Verdanson. Je ne cache pas que c’est un peu mon petit bébé même si l’idée de l’organiser me file un peu des boutons aujourd’hui. Le but était de fédérer les graffeurs, de passer du bon temps, de se retrouver ou de se rencontrer. J’invite une vingtaine de personne la première année juste pour revoir des vieilles têtes perdues de vue depuis mon départ à Bordeaux et de fil en aiguille je reçois plein de demandes de participation.
Les années suivantes sont mémorables, les gens viennent de loin, les potes de potes, des nouveaux mais aussi des anciens qui ont pas lâché l’affaire après toutes ces années. En 2017 nous sommes 80… Tous sur fond noir, 17 équipes de 4 à 8 graffeurs en moyenne sur un thème commun. 240 mètres de long 4,50 mètres de haut… Sober montera une petite vidéo, pour les curieux elle est visible ici. En 2017 je quitte Montpellier pour visiter quelques mois la Colombie. Encore aujourd’hui je reçois parfois des messages «Oh cousin, on remet ça cette année ?»… Qui sait !
#6 Medellín c’est magique
l’année 2018 est clairement marqué par ce voyage en Colombie avec Cec’. Lors d’une rando, par le plus grand des hasard – et c’est peu dire car les touristes à cette époque de l’année n’étaient pas très nombreux – je rencontre Polzo. J’avais vu quelques peintures fraiches de lui dans d’autres villes un peu plus tôt, c’était la première fois que l’on se croisait. Mais nous étions tous les deux du sud de la France et nous avions quelques connaissances en commun, l’histoire était assez troublante j’évite les détails, mais elle nous a rappelé à tous à quel point le monde est vraiment petit… Et comme quoi il faut parfois partir en voyage à l’autre bout du monde dans un parc national sur la côte caraïbe de la Colombie pour rencontrer son voisin. Il voyageait aussi avec sa copine Meau, nous avons passé tous les quatre un bon mois et demi ensemble tellement le courant est bien passé. Je ne ferais pas un 12shot spécial Colombie mais nous laissions des pièces dans chaque ville où l’on trouvait une quincaillerie qui vendait des sprays. Celle ci c’est lors de notre passage à Medellín, dans le quartier Santo Domingo, sous le métrocable.
#7 Bogotá
Rendez-vous est pris pour la fin du séjour à Bogotá, avec un activiste bien connu là-bas : Ospen du INK crew.
Le rdv au shop est à dix heures du mat, arrivée du type à midi pour le repas… Le temps de s’enfiler l’almuerzo à 7000 COP, et de rejoindre ce super spot pour une peinture tout les deux. Skida était aussi de la partie. Fin de journée on sirotait quelques Club Colombia Dorada, la bière locale, chez l’épicier du coin sur un vieil album de Rocca. J’ai rayé l’album Entre deux mondes quand j’étais ado, «moi je viens de Bogotá, Paris ne peut pas être pire que ça». Il avait franchement pas tort, la Colombie est un pays magnifique, Bogotá une ville contrastée…
#8 L’île intense
Petite fresque à mon arrivée à la Réunion avec mon poto Gofre que j avais rencontré à Toulouse, et qui vit là bas depuis plusieurs années. ABR ou A Beastly Rage qui trainait déjà avec nous sur les fresques 3GC à Bordeaux, et ses persos franchement torturés, je sais pas d’où il les sort mais allez voir son taff c’est flippant. Et Yann le Gall bien connu à la Réunion pour ses déferlantes qui fleurissent un peu partout sur l’île, et qui continuent de faire fantasmer les amoureux de l’océan indien.
#9 Ca Ravine
Ce jour là avec Gofre on a bien failli mourir ! Ol a commencé à pleuvoir quelques gouttes dans les hauts, nous étions dans ce tunnel vierge dans une ravine que j’avais repérée quelques jours plus tôt. Nous avons plié tout le matos et, en l’espace d’une minute, une vague de boue nous à obligé à sortir en urgence. Nous avions déjà de l’eau jusqu’aux genoux, je revois Gofre perché sur son rocher à qui je disais depuis l’autre coté de la rive : « Traverse, l’eau va encore monter ! ». De l’ adrénaline sans flics ni course-poursuite, il faut le faire ! L’île intense est vraiment imprévisible… Nous y sommes retournés le lendemain pour terminer.
#10 Barcelone avec Media
De passage sur Barcelone, j’ai contacté Media qui était lui aussi dans la capitale Catalane au même moment. Nous nous étions rencontré au Meeting of Styles de Milan quelques semaines auparavant. Mauvaise nouvelle, il m’appelle le matin même pour me dire qu’il s’est pété la jambe la veille… Il fera sa peinture quand même, avec plâtre et béquille… Belle performance !
#11 Un article Drips sans panel ?
Je ne traîne plus dans les dépôts depuis belle lurette. Du coup désolé mais je suis obligé de vous sortir les vieux dossiers ! Avec mon vieux blase mytho, et les vieux modèles qui feront rire les nostalgiques. C’est pas plus mal. Comme le dit Sadur : « un graff n’est beau que s’il est transposable sur panel ». Je suis dans un sens plutôt d’accord avec lui, le support est très important, ça vaut aussi pour les murs. Les lieux, les formats, la photo, l’environnement… Mais les vrais étoiles dans les yeux ça reste les panels, et je suis de près tout ce qui sort des dépôts encore aujourd’hui. Insta c’est la nouvelle gare mondiale.
#12 Le futur
Mes dernières pièces sont réalisées selon un processus de décomposition et de recomposition. La pièce se lit dans son ensemble mais l’œil cherche les découpes, l’abstraction. Ce travail rejoint l’ univers que je développe sur châssis entoilé. J’adore le côté plastique , numérique et graphique que peut prendre le graffiti et je reconnais clairement avoir un faible pour les lettres simples et lisibles : les pièces propres, quel que soit le support. Depuis toutes ces années je ne décroche jamais l’œil de la rue. Comme beaucoup j’en suis sûr, je conduis en regardant d’avantage les murs que la route, spectateur permanent de ce que font les anciens et les nouveaux dans mon coin.
Cette pièce est l’une de mes dernières, avec Twone pas loin bien sûr mais aussi Momies et Fodé, deux writers que j’ai toujours admiré depuis gamin.
Plus de photos de Kenz ici.