Organiser un jam sans aucune subvention, se mettre au tatouage tout en peignant régulièrement… Un planning plutôt chargé pour RedOner qui trouve tout de même le temps d’enchainer les wildstyles, dans le Sud de la banlieue parisienne.
Au fin fond du 91, nous l’avons rencontré pour lui poser quelques questions.
Peux-tu te présenter ?
Red1, IMF, PM. J’ai commencé à taguer en 1998. J’ai peint mon premier mur en 2000.
Comment t’es-tu mis à peindre ?
Le grand frère de mon pote faisait un peu de tags et on a accroché direct sur ses dessins qui trainaient et ses cassettes de rap cainri. Dans le même temps, je prenais la ligne C avec ma mère les peintures le long des voies m’ont mis une claque. Beaucoup de qualité et de couleurs à l’époque sur la ligne. J’ai surement fait mes premiers tags avec une bombe pour bagnole récupérée je ne sais pas où. On a galéré longtemps avant de savoir qu’il y avait un magasin, des mags…
Avec qui ?
Avec mon gars Cerone, un tagueur invétéré.
Où ?
Dans le 91. On était des gamins, donc on ne bougeait pas trop loin. Mais on avait la chance d’avoir Tsho des P19 qui habitait le quartier. Du coup on pouvait voir des gros murs qui nous ont bien motivés à l’époque.
Peins-tu exclusivement des murs ?
J’ai fait pas mal de toiles à une époque, quelques expos sans prétention, c’était le début des ventes aux enchères à tour de bras. J’ai exposé la dernière fois en 2012, depuis je ne fais plus que des murs.
Quelles sont tes références ?
Les anciens de mon coin : D7K, 1K, DSK, P19. C’est mes premiers traumatismes Graffiti, ensuite les allemands, Daim, Loomit avec leur vision de la 3D. A l’époque, je trouvais ça complètement fou. Pas facile de ne pas citer certains Kings comme Dare ou Mode2, mais j’imagine que ce sont les références de tout le monde. De manière générale, j’aime tout ce qui se rapproche du wildstyle.
Quels sont tes spots préférés ?
Comme beaucoup, j’ai une vraie préférence pour les bâtiments désaffectés parce que le tracé direct, c’est vraiment un truc mortel. Donc, quand je trouve du vierge je suis comme un gosse. Des gars de mon crew comme 6Pack ou Spot ont fait beaucoup de terrains vierges et m’ont motivé dans cette direction. Mais, ça se fait rare en région parisienne, en plus je n’ai pas le temps de rôder.
Tu es plutôt jam ou mur en terrain ?
C’est toujours cool de retrouver certains copains dans les jams, mais le terrain c’est comme à la maison, on est plus dans notre truc, plus concentré.
Et les persos ?
J’aimerais avoir le niveau de certains pour habiller mes pièces, parce que je trouve que ça apporte un truc en plus. Mais à chaque fois que j’en fais un, je ne suis pas convaincu du résultat. Je regrette l’époque ou Darkelixir s’occupait de ça pour moi.
Pourquoi peindre des lettrages en une teinte ?
J’aime beaucoup travailler la couleur, mais je suis parti là-dessus parce que j’étais en galère de peinture. J’ai plutôt l’habitude de mélanger les teintes entre elles. J’ai donc juste pris un dégradé et j’ai essayé de faire un apprêt qui se rapprochait d’une de mes teintes pour pouvoir recouper et travailler un camaïeu. J’ai fait toute une série dans le même esprit. Depuis, j’ai récupéré des sprays, je suis donc revenu à mes bonnes vieilles habitudes.
L’Art Aux Gants, qu’est-ce que c’est ?
Un festival qui a eu trois éditions entre 2013 et 2015. Au début, c’était un jam dans sa forme la plus classique, des gros murs au même endroit pendant deux jours avec une sélection de crews faites par nos soins. Par la suite, on a ajouté un battle et des murs éparpillés dans la ville. C’est un jam classique dans sa forme mais pas forcement dans le fond. On a monté ce festival sans aucune subvention, avec juste l’autorisation de repeindre un gymnase, de vendre de la bière et de poser des tentes en cas de pluie. On a monté ce projet avec une idée précise : faire un Jam avec un line up de qualité et surtout, cohérent, avec comme objectif de mettre à disposition les meilleures conditions possibles pour les artistes.
Qui sont les organisateurs ?
Avec Mr Bien, on à monté ce projet à deux. On a été ensuite rejoint par Sink, Otam et Kalees.
Ça se passait où ?
A Sainte-Geneviève-des-Bois, dans l’Essonne.
Qui étaient les invités ?
Pour les trois éditions, on a invité : Skey, Mask, Torek, Songe, Done, Darkelixir, Resh, Wilo, Inock, Soy, Tonce, Dashe, Vaper, Dely, TSF crew, Mata, LEGZ, Onickz, Wise, Stom500, Ceon, Popek, Tank, Yone, Locatelli, Gomer, Sofles, Hopare, Smug, Epok, Bonzai, Shick, Kak, Gris, Saturno, Korse, Eight, Nask, Chek, Shure, Spazm, Sweo, Rens, Zekw et les crews NOK, IMF, 3HC, JPP, GF, Love Letters.
Comment avez-vous fait sans aucune subvention ?
L’idée c’était de dépendre de personne et de n’avoir aucun compte à rendre pour avoir totalement la main sur notre événement et surtout son contenu. Mr Bien étant bien implanté dans le secteur, il a réussi à débloquer des plans décos tout au long de l’année, et avec l’argent et le matos on finançait le festival.
Des retours sur cet évènement ?
Vue la qualité des prods, on a eu plein de bon retours. L’important pour nous c’était le retour des artistes, et je crois qu’ils en gardent tous un très bon souvenir.
Des anecdotes particulières ?
Il y en a beaucoup, open bar aidant… Mais je ne voudrais pas afficher certains, alors j’évoquerais plutôt un bon souvenir : dans la nuit du samedi au dimanche, on a des rageux qui ont pété nos structures montées pour le battle. Obligé de remonter ça dans la mâtinée, sous la pluie, une galère. Mais certains participants du battle sont arrivés très tôt et sans qu’on demande rien, nous ont direct donné un coup de main. Big up en passant !
Une prochaine édition prévue ?
Pas de nouvelle édition de prévue, la vie fait qu’on n’a plus le temps de s’occuper de ça, et que notre projet c’était vraiment des murs collectifs, des crews ou au moins, des gens qui peignent ensemble pour faire une prod. Il y a beaucoup d’artistes en solo maintenant, et ça se ressent de plus en plus dans les festivals. Chacun a son espace, sa façade. Ca nous parle moins.
Et Top2bottom, c’est quoi ?
C’est ma société de création graphique. A part le nom, il n’y a pas grand chose à voir avec le Graffiti.
Et le tatouage ?
Ça fait quatre ans que je m’y suis mis, suite à l’ouverture d’un shop par un de mes potes plus âgés que moi. Il m’a montré beaucoup de choses concernant le Graffiti, il a fait pareil avec le tatouage. Merci à lui en passant. C’est un mouvement très riche. Dans les artistes qui m’influencent, je peux citer : Logan , Victor Chill, Paco Sanchez, Koan.
Quel est le lien entre ta pratique de graffeur et celle de tatoueur ?
Il y a un lien direct parce que c’est ce qui m’a amené au tatouage. A la base, je n’ai pas vraiment de culture tatouage, ça n’a jamais été mon truc, souvent trop marqué rock, dark , toute l’imagerie classique ne me parle pas plus que ça. J’ai simplement transposé mon univers Graffiti dans mes dessins de tatouage. Par la suite, je me suis rendu compte que beaucoup de gars venant du graffiti font ça dans le même esprit, ça apporte beaucoup de fraîcheur.
Des projets ?
Continuer à peindre des murs régulièrement et faire plus de sérigraphie avec les copains d’Obvious Store.